Chroniques, Livres

Aussi riche que le roi – Abigail Assor

Casablanca, années 90.

Dans ce livre il y a deux mondes. Le premier est plein de vérités, il est juste et sans clichés. Il dresse le portrait de la jeunesse dorée Casablancaise, des villas d’Anfa, de ce monde à deux vitesses qu’est la capitale économique avec ses boîtes de nuits, ses lois qu’on contourne, sa misère, et les enfants inégaux qu’elle enfante. Casablanca la carnassière, Casablanca la douce. Casablanca la schizophrène.

Dans le deuxième monde, il est question de Sarah, une Française qui vit dans le quartier populaire (disons le mot : bidonville) de Hay Mohammadi. Pour sortir de la misère, Sarah jette son dévolu sur les riches héritiers des quartiers d’Anfa et utilise ses charmes pour y arriver. Elle ne veut pas d’amourette non, elle veut se marier, avoir aussi une piscine aussi bleue que l’océan et le ciel de la Méditerranée, des domestiques et des alliances grosses comme un poing.

Deux mondes, et parce que je n’ai pas réussi à les faire se rencontrer, ma lecture a été en demi-teinte.

Une Française qui vit dans un bidonville. Dans cette phrase il y a un oxymore. Dans le monde où j’ai grandi, les Français et les étrangers en général ne vivent pas dans les bidonvilles. Et s’ils ne sont pas forcément dans les hautes sphères de la bourgeoisie, au pire ils appartiennent à la classe moyenne. Ils ont accès aux clubs privés, à l’éducation gratuite, aux maisons secondaires.

Alors dans ma tête de lectrice, le puzzle ne prend pas forme, malgré la qualité de l’écriture, ça ne colle pas, je valse entre les scènes très justes de Casa et cette improbabilité dont je n’arrive pas à me débarrasser. Et dans cette cacophonie qui m’est propre, je manque le rendez-vous avec cette histoire.

C’est bête, parfois ça ne tient à pas grand chose d’être embarqué dans une lecture. Parce que pour le reste, l’histoire est là, le style, les personnages, la poésie à certains moments, et la vérité de ce Maroc à la fois écorché et beau, si dure à décrire à ceux qui ne l’ont pas approché de l’intérieur.

Aux Editions Gallimard

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