Chroniques, Livres

Fahreinet 451 – Ray Bradbury

Le café du classique, c’est comme un café tout court, quand tu y prends goût, tu as du mal à t’en passer.

Cette fois, nous sommes 45 à nous attaquer au livre de Ray Bradbury, au titre imprononçable pour nous autres latins, Fahreinet 451. C’est la température à laquelle on dit que les livres brûlent. En 1953, R. Bradbury imagine un monde, où, pour unifier la pensée, taire les rebellions, les livres sont brûlés, ironie du sort, par les pompiers. Les murs écrans remplacent les interactions, les portes annoncent les visiteurs, les vérandas et plus généralement tous les espaces où l’individu peut se laisser aller à penser, à discuter, sont supprimés. Tout n’est que technologie, tout n’est que vide.

Un malaise confus m’a accompagnée durant toute la lecture, ce n’est que vers la fin que la fulgurance m’est tombée dessus : je ne suis pas effrayée. Et je suis effrayée de ne pas être effrayée.

Alors certes, en 1953, R. Bradbury a imaginé un monde à l’extrême. Mais à se demander s’il est si loin du nôtre. La pensée unique, les écrans, la culture non essentielle… des petites choses comme ça auxquelles on s’habitue dangereusement au point de ne plus les voir, même dans une lecture de dystopie.

Alors je ne sais pas pour vous, mais même à Fahrenheit 451, moi ça me fait furieusement froid dans le dos.

Chroniques, Livres

De Grandes Espérances – Charles Dickens

Les classiques ont cela de bon qu’ils nous font voyager. Pas uniquement dans une époque ou pays lointains, mais aussi à travers ce style bien particulier qui utilise des temps d’une conjugaison qui moisit dans nos bescherelles d’adolescents.

Charles Dickens est connu pour écrire sur les enfants, en leur nom et à travers eux. Surtout ceux qui viennent de milieux populaires.
De grandes espérances ne déroge pas à la règle. Le petit Pip (Philip Pirrip) est orphelin, et élevé d’une main de fer par sa sœur. Il a pour ami cher Joe, le mari de celle-ci, et il sauve dans la naïveté et les peurs obscures de son enfance un forçat évadé.
Il est appelé un jour par Mme Havisham, l’excentrique et richissime vieille dame qui vit dans les ruines de son château et de son cœur brisé par un fiancé déserteur.

Dans ce château où le temps s’est figé, Pip fait la connaissance d’Estelle, enfant comme lui, élevée par Mme Havisham pour briser le cœur des hommes. Il en tombe instantanément amoureux, et fera tout pour s’élever à la hauteur de son rang, avec l’arrivée à point nommé de ce qu’il appellera « ses grandes espérances », une fortune qui lui tombe du ciel et qu’il attribuera à la bonté de Mme Havisham.

Voguant entre Londres de l’époque victorienne et les marais de son enfance, sa culpabilité et besoin de tourner le dos au monde qui l’a vu grandir et aux personnes qui lui sont chères, le jeune Pip grandit, découvre les déceptions et les fêlures, les amitiés et la bienveillance, en un mot découvre la vie, sous une plume mordante d’humour et d’intelligence.

Chroniques, Livres

La couleur pourpre – Alice Walker

Lecture commune avec d’autres camarades blogueurs de ce classique américain salué par le prix Pulitzer à sa sortie et porté à l’écran par Spielberg en 88.

Je n’en savais rien en ouvrant le livre, je lis rarement les quatrièmes de couverture pour conserver tout le mystère du roman dans lequel je plonge. Et voilà la claque dès la première page. Et en voilà cinquante englouties dès la première soirée de lecture. Le roman s’étale sur plusieurs décennies du 20ème siècle, depuis les 14 ans de la narratrice, Celie, jusqu’à son âge mûr et ses cheveux blancs. Issue d’une famille pauvre, non instruite, elle raconte au « bon Dieu » les drames qui s’enchaînent avec la langue et la résignation d’une enfant déscolarisée et promise à la servitude par son genre et sa couleur de peau.

Au fil des rencontres sur sa route, malgré les coups qu’elle reçoit, les douleurs du corps, le manque de sa sœur, la fatalité de son rang, sa langue et son esprit s’affranchissent, et on assiste à un glissement subtil de la jeune adolescente vers une femme plus consciente de ses désirs dans cette Amérique des années 20, puis 30 jusqu’à ce qu’on imagine être les années 70.

Cette chronique reste vague à dessein pour ne pas dévoiler l’essentiel, et pour faire écho à l’écriture d’Alice Walker, qui ne dit pas tout, qui laisse tout l’espace au lecteur de deviner certaines subtilités (ce qui est à mon sens l’un des grands atouts de ce livre).

Cette lecture commune 2.0 a vu se déchaîner les avis mitigés, enthousiastes ou incommodés, dont les chroniques sont à retrouver sur les comptes des amis blogueurs.

Celie n’aura laissé personne indifférent.